Témoignage donné en 1995 d’un algérien qu’il avait côtoyé neuf mois durant en 1959-1960 :

« Lui qui m’avait ouvert les bras sans ignorer que je sortais d’un camp de détention, malade, dans la misère et plein de haine, à peu près dans le même état d’esprit que les jeunes misérables qui ont mis fin à ses jours. Sa volonté de se faire enterrer ici m’a bouleversé plus encore…

 

Le père Jean n’a pas fait de moi un chrétien, mais il m’a conduit à Dieu sans me prendre par la main, sans m’en parler dans le langage propre aux hommes de religion. Il m’a suffi de le regarder vivre et de méditer sur sa conduite pour me convaincre que la bannière de Dieu est une, quelle que soit la couleur que lui donne les hommes, ici ou là, et j’ai pu exorciser le mal qui m’habitait. Ma raison et mon jeune cœur se sont inclinés devant cette droiture et cette extrême bonté que je ne soupçonnais pas chez les « autres » toutes ces trente dernières années, son regard lumineux et si paisible n’a jamais quitté longtemps mon esprit. J’ai attendu longtemps, mais vainement hélas, le plaisir de croiser de nouveau son regard bienfaisant, de revoir encore une fois l’expression toujours délicieuse de son visage et de lui dire merci, de vive voix, pour tout ce qu’il a donné à mon cœur et à ma raison, probablement sans en mesurer toute la portée, lui qui servait sans compter et sans attendre de récolte à engranger, parce qu’ayant choisi de vivre la générosité dans sa pleine dimension. »